c’est quoi le taichi ?

Si vous êtes pratiquants aux « Chemins du Taiji », vous disposez d’une version plus complète dans l’espace privé du site…

Avant d’essayer de vous expliquer ce qu’est le Taichi, je vais commencer par vous dire…

ce qu’il m’a assez rapidement apporté !

Dans notre quotidien, nous sommes assez nombreux à avoir une vie bien remplie, avec des journées qui paraissent un peu trop courtes, des sollicitations de plus en plus nombreuses (publicités, écrans, réseaux sociaux et depuis plusieurs années, une actualité un peu trop présente!) et tout ça a tendance à nous mettre en surtension.

Et se prendre juste une petite heure dans la semaine à se mettre aux antipodes de notre rythme de vie, en ralentissant et en tournant notre regard non pas vers les stimuli extérieurs mais plutôt intérieurs, va vite (c’est un comble au milieu de cette lenteur) nous aider à nous recentrer, à prendre un peu de recul et à évacuer le stress.

Et ça, c’est déjà pas mal, même si en soi, la finalité du Taichi ne se résume pas à cela.

Alors le Taichi, c’est quoi ?

Ma vision du Taichi évolue au fur et à mesure de mes années de pratiques. La description qui suit est donc un essai pris à un instant T !

On entend souvent que c’est :

– une gymnastique chinoise : « chinois » c’est sûr  mais le terme « gymnastique » est sûrement un peu limitatif, ne traduisant pas toute la dimension de cette discipline, quoique je trouve à la gym de nombreuses qualités

un art martial interne : on ne sait pas vraiment ce que cela veut dire

une pratique dans laquelle on fait des mouvements lents et qui a tendance à détendre : voilà qui est un peu plus clair sans pour autant nous aider à comprendre de quoi il en retourne !

Qu’on se le dise, c’est une activité plutôt abstraite pour la plupart des gens…

Bon, pour tenter de vous faire comprendre ce qu’il en est, je vais déjà vous décrire comment on progresse en Taichi…

  • 1ere étape : apprendre la forme de base

On va commencer par mémoriser un enchaînement de mouvements qu’on appelle « forme ».

Cette chorégraphie va vous apporter les premiers bienfaits du Taichi, à savoir une amélioration :

– de votre équilibre

– de votre coordination

– de la représentation de votre corps dans l’espace (ce qu’on appelle schéma corporel)

Ces mouvements sont précis et, au départ, ils vous demanderont d’être attentif pour pouvoir les reproduire.

Cette attention soutenue va en quelque sorte diminuer vos pensées superflues et parasites. Je ne dis pas que vous allez arrêter de penser, mais je suis à peu près sûr que vous penserez moins, et dans l’idéal, que vous ne serez présent qu’à ce que vous faites. Ce calme mental explique en partie pourquoi on dit que le Taichi détend !

Mais viendra un jour où la forme sera mémorisée. Vous réussirez alors à la réaliser de manière automatique… et plus rien ne vous empêchera de la « dérouler » en pensant à autre chose !

Envolé le calme mental…

Envolée la détente !

Ah !

Passons donc à la suite…

  • 2e étape : entreprendre un voyage intérieur…

On va tirer profit du « déroulement automatique » de la forme pour porter une attention soutenue sur une zone du corps, puis une autre…

Ce qui nous permettra :

– de prendre plus conscience de cette zone (amélioration du schéma corporel toujours)

– de la mobiliser de manière plus subtile (ce sont souvent des zones dont on a peu conscience, qui sont sous-mobilisées voire qui ont tendance à être -presque- figées!)

Au final, cela semble délier le corps et rendre plus fluides les mouvements.

Viendra ensuite le temps de créer des liens entre ces différentes parties du corps et d’affiner nos ressentis.

Une véritable exploration intérieure…

Cette attention soutenue au corps, cette écoute sensitive intérieure éclaire ce qualificatif d’« interne » juxtaposé aux termes « art martial » !

  • Et en parallèle de tout ça…

Au delà de la « forme », il existe tout un panel d’exercices à découvrir et à s’approprier dès le début de la pratique (et qui sont tout aussi important que le reste)

Certains permettront de toucher du doigt la notion de « Song » 鬆 puis de l’explorer ! Si je devais décrire succinctement « Song » 鬆, je dirais que…

dans le maintien d’une posture donnée (vous prenez une position précise et vous tentez de la tenir), l’idée sera d’essayer de relâcher toutes tensions superflues, de maintenir la posture suspendue en étant le plus détendu(e) possible et en sollicitant un minimum d’activité musculaire.

Sa découverte se fait… très progressivement !

Double détente !

On voit donc poindre ici l’idée d’une détente volontaire du corps… qui complétera le calme des pensées induit par l’attention soutenue que nous demande la pratique !

Un double effet détente en quelque sorte : un corps qu’on essaie de relâcher au maximum, et des pensées moins nombreuses…

Vous voilà donc un peu plus éclairé(e)s sur le « pourquoi du comment » de cette activité qu’on dit « relaxante » !

Se détendre : Une finalité ? Un moyen ?

C’est un bienfait qu’on vient souvent chercher en se mettant au Taichi.

Comme je le disais au départ, le bien-être qu’on en retire justifie qu’on s’intéresse à cette activité et nul besoin de voir plus loin si c’est ce qui vous y amène et que vous ne souhaitez pas aller au-delà ! Cet objectif se suffit à lui-même. Profitez de votre pratique et savourez…

… mais quand on commence à mieux percevoir son corps et à approcher un tant soit peu « Song »鬆, à réussir à mieux se relâcher (et c’est une sensation qui n’est jamais acquise, une sorte de Graal qu’on croit un jour frôler et qui le lendemain nous file entre les doigts!), il est possible, me semble-t-il, qu’émergent des perceptions que nous n’avons pas l’habitude de côtoyer.

Et la détente n’est plus une finalité mais devient un moyen d’aller plus loin…

Loin de moi l’idée de vous faire croire que j’ai tout compris, il me reste une « terra incognita » infinie et passionnante à explorer.

D’où viennent ces perceptions ?

Imaginez-vous vous promenant dans une forêt, un poste radio à la main diffusant un programme qui capte votre attention. Ce n’est pas qu’il soit du plus grand intérêt, mais vous ne pouvez faire autrement que de l’écouter. Ce programme, ce sont vos pensées qui vagabondent et les (sur)tensions inutiles de votre corps.

Je vois le Taichi comme étant un moyen de baisser le volume, de diminuer les bruits parasites (vos pensées superflues et tensions musculaires inutiles). Cela se fait progressivement, tranquillement… et peu à peu, vous entendez mieux ce qu’il se passe au sein de la forêt ; vous percevez mieux ce qu’il se passe au sein de votre corps. Ces perceptions n’apparaissent pas comme par magie, elles sont juste là, masquées et enfouies sous les bruits parasites !

Je pense que ces sensations sont propres à chacun, qu’elles peuvent changer d’une séance à une autre pour chacun, alors j’ai pour habitude de ne pas les décrire (en vous focalisant sur une description que j’aurais pu faire, vous ne chercheriez qu’à percevoir cette sensation et vous ne prêteriez pas attention à d’autres ressentis que moi-même je n’aurais peut-être pas perçus dans ma pratique).

J’aimerais donc juste vous amener sur le chemin qui vous permettra de baisser le volume !

Avant de conclure, un petit aparté sur un piège à éviter…

Je m’éloigne un tout petit peu du sujet pour pointer du doigt un défaut dans lequel on tombe facilement.

Globalement, dans le Taichi, que ce soit l’apprentissage de la forme (bien reproduire l’enchaînement demandé) ou cette attention soutenue dont j’ai parlé (et qui décroche souvent), il y a beaucoup d’éléments à retenir et sur lesquels travailler (« jouer » est peut être un terme plus adéquat, n’oublions pas de prendre du plaisir à la pratique!), et vous allez assez vite vous rendre compte qu’on n’arrive pas à tout faire d’un coup, loin de là, et qu’avant que le geste soit juste, que la qualité de présence soit bonne, il va falloir des répétitions et des répétitions.

Concernant cette attention qu’on voudrait soutenue, il faut bien dire qu’elle a vite tendance à se détourner du corps pour aller vers les pensées sans que vraiment on ne s’en rende compte.

En fait, on le réalise justement quand on se dit : « Tiens, j’ai décroché ! » mais on ne sait pas vraiment depuis combien de temps.

Et c’est à cet instant qu’il ne faut pas se dire qu’on n’y arrive pas (ou qu’on est mauvais, nul ou tout autre adjectif dévalorisant). Parce que je dois vous avouer que même après de nombreuses années de pratiques, il y a des jours où ça marche bien (et encore, on décroche) et d’autres ou carrément on perd le fil sans arrêt.

Donc, une attitude plus saine serait plutôt de se féliciter d’avoir capté qu’on a décroché (même si on ne sait pas depuis combien de temps) et d’en profiter pour tourner à nouveau et intentionnellement son attention vers le corps !

J’ai entendu dire, et j’aime bien cette comparaison, qu’il faut pratiquer le Taichi comme un tout jeune enfant apprend à marcher. L’enfant n’a pas encore cette construction éducative et/ou sociétale de jugement et d’auto-jugement. Il se lève et tombe mille fois avant de faire ses premiers pas. Et pourtant il ne se juge pas, il ne se dévalorise pas, et heureusement me direz-vous, car sinon nous serions assez peu dans ce monde à savoir marcher (imaginez un monde d’adultes rampant) !

Pour conclure : « La carte n’est pas le territoire… »

J’emprunte cette citation au philosophe Gregory Bateson (et l’idée à mon professeur Philippe Thiriot. Ce n’est pas la première que vous lisez, mais il me fallait bien parler de lui pour pouvoir le remercier et le citer comme source de référence sur cet essai personnel d’explication du Taichi! Vous trouverez son site à cette adresse : https://www.asso-taiji.com/), et cette courte phrase est tout à fait appropriée pour conclure une si grande continuité de mots alignés les uns derrière les autres et qui vous ont, je l’espère, apporté une petite connaissance sur le Taichi, tout du moins d’un point de vue intellectuel.

Si le Taichi est comparable à un voyage, ce n’est pas en étudiant une carte, en lisant un livre ou en écoutant une conférence sur un pays que vous aurez fait l’expérience de cette région ! Les mots ne traduiront jamais la richesse d’un séjour sur place…

Il en est de même pour le Taichi : les belles paroles (et j’y inclus les miennes!) ne remplaceront pas les perceptions qu’on ressent en le pratiquant.

Alors oubliez tout ce que vous venez de lire… et si vous êtes tentés, venez découvrir… puis, qui sait, pratiquer pour un trimestre, une année, 2 années ou 10 ans et plus si affinités !

« La carte n’est pas le territoire… »

Prêt pour le voyage ?